Maya, cette notion bouddhiste fréquemment rencontrée, peut être traduite par illusion cosmique, ce qui ne nous est pas familier et peut poser un problème d’interprétation.
Pour expliciter cette notion certains Lamas utilisent l’illustration du soleil se reflétant à la surface d’un lac :
- Le soleil représente le Principe des choses et des êtres, transcendant et immuable. (Ce qui correspond exactement à la définition chrétienne de Dieu chez St Grégoire le Grand)
- Le reflet du soleil sur l’eau représente les choses ou êtres « créés ».
Ce reflet n’est qu’une illusion par rapport au soleil. Toutefois, en tant que reflet, il a bien une existence réelle. Il est donc à la fois illusoire et réel. Sa réalité dépend de sa relation avec le soleil puisque, si on l’isole du soleil, le reflet disparaît !
L’être créé, l’homme comme le monde, serait de la même manière une illusion par rapport au Principe ou à Dieu, tout en ayant une certaine réalité en tant que reflet de ce Principe. Isolé de son Principe, l’être créé perd sa « réalité ». L’être est à l’image du Principe comme le reflet est à l’image du soleil. Dieu créa l’homme à son image, lit on dans la Bible… L’Univers, comme les êtres qui le peuplent, serait donc réalité en lui-même, mais illusion au regard du Principe.
Rien n’est cependant illusoire en soi : l’illusion, constitutive alors de l’erreur matérialiste, réside seulement dans le fait de prendre le reflet pour le soleil, ou le monde pour la réalité suprême…
L’illusion cosmique réside en fait dans l’ignorance de la réalité suprême et des rapports entre cette réalité suprême et la réalité apparente. L’homme, par prise de conscience effective de cette illusion, s’en délivre. Il réalise alors l’union avec le Principe suprême : c’est l’état de délivré, de Bouddha vivant.
La compréhension de cette notion d‘illusion cosmique n’est pas sans implications :
- Le Monde, comme le reflet, serait donc à la fois identité et distinction.
- Identité puisque le reflet n’est pas autre que le Soleil (la création n’est pas autre que Dieu…)
- Distinction puisque le reflet n’est cependant pas le soleil (la création n’est pas Dieu…)
Dire que le Monde est à la fois identité et distinction paraît contradictoire en logique pure, mais valide la notion de non-dualité. Cette notion, particulièrement familière aux orientaux, suppose non pas la négation de la logique, mais son dépassement, comme l’enseignent de nombreuses Traditions, et comme y inclinent de nos jours les avancées scientifiques dans les domaines de la physique quantique ou de l’astrophysique.